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[Lumière sur] Jean-Philippe PAVARD, promo 2009, parcours dans le traitement de l’eau

Résumé

Archive du 11/05/20 – Aujourd’hui nous vous proposons le témoignage de Jean Philippe, diplômé en 2009 qui revient sur son parcours dans le secteur du traitement de l’eau. Nous parlerons également de l’importance de s’engager dans des activités extrascolaires qui peuvent donner de la couleur dans une carrière .

Jean-Philippe, peux tu te présenter rapidement?

Je m’appelle Jean-Philippe Pavard, je suis rentré à l’école en 2005 (promo 2008) pour finir dans la promo 2009 après ma césure à l’étranger. J’ai suivi la filière GCP (anciennement CP) car l’année où je suis arrivé, la fusion avec l’ISTAB n’avait pas encore eu lieu. Je vis aujourd’hui à Lyon, où je viens de prendre un poste chez Serpol, dans le domaine de la dépollution.

Peux tu nous en dire plus sur ton année de césure ?

J’ai commencé par mon stage de deuxième année au Québec, où j’ai travaillé pendant 6 mois avec l’INRS sur le traitement de l’eau par électrocoagulation. Comme je n’avais pas envie de rentrer en France, j’ai contacté l’école pour leur faire part de mon projet, et j’ai activé mon réseau pour trouver un autre stage. J’ai finalement trouvé un poste grâce des élèves de l’école aux Pays-Bas, sur le revêtement des panneaux photovoltaïques à base de nanoparticules. Pour terminer, toujours grâce à d’autres camarades, j’ai trouvé un stage à Montréal, dans une entreprise qui fabriquait des films plastiques pour les emballages de l’industrie laitière. Je suis revenu fin 2008 à l’école, pour terminer mon cycle ingénieur. Je recommande fortement l’année césure, car au delà d’apporter des expériences concrètes, elle enrichit grandement ta vision du monde et du travail. Je me rappelle qu’en 2A on ne savait pas vraiment ce qui nous attendait concrètement, et j’ai vraiment senti la différence à mon retour avec mes camarades restés en France.

Quel était le lien entre tous ces sujets, la logique de ton parcours ?

Je dirais qu’il n’y a pas de lien évident apparent au premier abord, cependant, il m’a permis de balayer un large spectre de domaines professionnels, des problématiques d’un laboratoire à l’organisation d’une multinationale, en passant par l’esprit start-up. Deuxièmement, j’ai pu monter en puissance sur l’anglais tout au long de ma césure : je parlais français à Québec, avec un peu d’anglais pour fond sonore. Au Pays Bas je parlais anglais, dans un contexte plus facile puisque très européen (les accents sont plus faciles à comprendre), puis j’ai terminé en milieu complètement anglophone à Montréal. Enfin je soulignerais l’importance du réseau en toile de fond. Toutes les opportunités qu’on m’a proposé, je les ai eues car j’ai su rester en contact avec les gens de l’école, en prenant des nouvelles régulièrement.

Effectivement, tu mentionnes beaucoup l’utilisation du réseau dans tes expériences professionnelles, qu’est-ce qu’il représente pour toi ?

C’est l’une des grandes forces de l’école de manière générale. Chaque année, il y a énormément d’opportunités au sein de l’école, et d’échanges entre élèves de promotions différentes pour trouver des stages. Typiquement, j’ai trouvé mon stage aux Pays-Bas grâce à une ancienne présidente BDS, et si mon projet de césure déposé au dernier moment a été accepté par la direction des études, c’est parce l’administration me connaissait un peu et que je ne sortais pas de nul part. Autre exemple, j’ai même eu l’occasion de passer un entretien à Newcastle pour AkzoNobel (billets d’avions offerts, j’étais encore au Canada), car ils avaient des élèves de l’école dans leurs équipes, et qu’ils appréciaient notre formation.

Donc oui, le réseau interne marche bien lorsque tu sais l’utiliser. Cependant, il ne s’agit pas juste de contacter les gens quand on a besoin d’eux, mais plutôt de les connaitre, d’entretenir de vraies relations avec eux. C’est quelque chose qui peut se démarrer par le biais des associations par exemple .

Tu étais dans une asso ?

Yes, j’ai été délégué de promo en 1A, puis en 2A. A ce titre, je suis également devenu membre du CHSCT ce qui m’a permis de créer un lien avec l’équipe pédagogique. En deuxième année j’ai rejoint le BDS. Ce sont de très bons souvenirs, nous avions relancé le tournoi Krystal créé pour la toute première fois l’année d’avant.

Selon toi, entrer dans une association est indispensable ?

Pas exactement. Les assos sont à la hauteur de ce que tu mets dedans. Il faut faire des choses que tu aimes bien et essayer de les porter en interne. Par exemple, avec d’autres camarades de promo, nous faisions pas mal de course à pieds, et on a décidé de monter ensemble le projet pour participer à la course croisière EDHEC Terre. Les assos sont des portes ouvertes pour faire plein de choses, pour peu qu’on se donne la peine de les porter et les partager. Bien sûr, on peut dire que cela m’a été utile, car j’ai pu rencontrer plein de gens, mais à chaque fois, nous avons pu nous entendre car ils sentaient que je ne jouais pas un rôle. Ce n’est pas la peine de s’inventer des personnages, il faut être sincère dans ce que l’on fait.

Au niveau professionnel, les associations dans lesquelles tu t’es engagé, et plus largement tes activités extrascolaires, te permettent de raconter ton histoire, de donner de la cohérence à ton parcours, ce qui est particulièrement utile en sortie d’école, quand tu n’a pas beaucoup de chose à écrire sur ton CV.

Justement, pour en revenir à ton parcours, cela t’a t-il été utile ?

En revenant en 3A, j’ai commencé à vouloir orienter ma carrière vers le domaine de l’eau, de préférence dans une grande structure, pour être bien formé. Paradoxalement à ce que j’ai pu dire avant, et malgré la césure, j’ai été dans les derniers à trouver mon stage de fin d’étude, chez Veolia. Pour la petite histoire, ils m’avaient proposé un premier stage au début de mes recherches, qui ne me convenait pas et que j’ai donné à un ami intéressé. Finalement, ils m’ont proposé de travailler en R&I à Paris, sur les procédés de filtration membranaires à haute performance (osmose inverse, ultra filtration). A l’issu de ce stage, j’ai voulu continuer sur cette lancée, en VIE (raison pour laquelle je cherchais initialement un grand groupe) que je n’ai trouvé que 6 mois après. Entre-temps, je faisais des petits boulots.

Pour ce VIE chez Veolia, j’ai dû passer cinq entretiens, qui se sont bien passés. Le dernier que j’ai passé illustre bien ce que je disais précédemment sur l’intérêt des activités extrascolaires : je rencontrais pour cela le directeur de VERI, la filiale R&D de Veolia, et lorsque je suis rentré dans son bureau, j’ai vu un bateau accroché au mur derrière lui. Faisant pas mal de navigation moi même, j’ai pu entamer la conversation à ce sujet et finalement, nous n’avons parlé presque que de ça. A ce stade de la sélection, nous étions deux candidats avec un parcours très similaire, pour deux offres, une en Australie, une en Arabie Saoudite. Je n’ai pas hésité à exprimer clairement le fait que je ne voulais que l’Australie, qui m’a été attribué par la suite. Je crois que c’est aussi une anecdote parlante pour un autre point important : dans le monde du travail, il faut être capable de dire ce que l’on veut pour ne pas se faire doubler ou oublier.

Que faisais tu exactement là-bas ?

J’ai donc passé 2 ans à Sydney, sur une usine de dessalement. Je suis arrivé initialement pour faire de la R&D (amélioration des consommations de produits chimiques) et mettre en place une plateforme de test. Deux mois après, je suis passé directement sur l’usine grandeur nature, avec beaucoup plus de missions, à tel point que nous avons embauché un assistant pour les expériences. Le site, initialement créé pour pallier à de longues périodes de sécheresses, a fermé deux ans après, car le niveau des pluies était revenu à la normal. Je n’ai pas été déçu de l’expérience, j’ai fait énormément de terrain, et j’ai acquis de grandes connaissances sur les techniques membranaires.

Et le retour n’a pas été trop dur ? Tu as pu enchainer avec un autre poste ?

Après l’Australie, les offres de Veolia ne m’intéressant pas, je suis resté au chômage 6-7 mois avant de trouver un poste de chef de projet chez ICE, à Annecy. C’est une PME qui fait des systèmes de pompage d’eau de rivières ou de nappes phréatique, ainsi que du dimensionnement pour des systèmes de traitement. La structure étant encore petite, j’ai pu toucher à beaucoup de domaines, comme le dimensionnement, les achats, ou les expéditions. Il y avait 50 à 80 employés, c’est une bonne taille d’entreprise, qui te laisse l’occasion de toucher à tout. Ce fut une superbe expérience, avec beaucoup de déplacements à l’étranger, particulièrement en Afrique du nord et au Moyen Orient. J’ai réalisé beaucoup de projet pour Nestlé Waters en Turquie, et réussi à créer un véritable lien avec les équipes locales. C’est un peuple très chaleureux, il ne faut pas aller là bas si on n’aime pas le contact humain ! En commençant avec un projet à 340k€, nous avons pu mener un projet à 4 millions lorsque je suis parti, quatre ans plus tard.

Pourquoi es-tu parti alors ?

Au bout de quatre ans j’avais un peu fait le tour, et Baxter m’a fait une offre, plutôt orientée pharmaceutique, que j’ai acceptée. Finalement, Danone, avec qui j’étais en contact depuis plusieurs années et avec qui plusieurs tentatives d’embauche avaient échoué, m’a recontacté, avec une proposition sérieuse dans le domaine de l’eau. Du coup j’ai quitté Baxter au bout de cinq mois, pour prendre le poste de responsable technique monde, sur les process d’économie d’eau dans les usines de production d’eau embouteillée. Bien que je ne sois pas resté longtemps chez Baxter, j’ai beaucoup aimé cette période. Ils ont une approche du travail très anglo-saxonne, très directe : on recherche avant tout l’efficacité, il n’y a pas de jeu politique (du moins je ne l’ai pas ressenti). C’était le scénario inverse chez Danone.

Tu n’as pas été satisfait de ton expérience chez DANONE ?

Dans mon cas, je pense que ce fut une erreur de les rejoindre même si c’est une superbe entreprise. Si ma mission était louable, et donc satisfaisante, le contexte dans lequel je la réalisais était complexe. C’est une multinationale qui fonctionne par pays, avec une entité monde pour chapeauter l’ensemble. Cependant, chaque pays a ses propres enjeux stratégiques, et sa propre organisation. Donc à chaque fois que je me déplaçais, il fallait que je comprenne les structures de chacun, qui était responsable de quoi, quel était le secteur d’autorité vers lequel me tourner etc… C’était pénible pour eux comme pour moi, puisque je devais pouvoir leur indiquer quoi faire, mais ne pouvais pas être opérationnel rapidement. Et puis il y avait beaucoup de politique pour le coup. Je suis resté un an et demi, et puis j’ai décidé de partir, car je voyageais beaucoup et je n’avais pas l’impression d’apporter beaucoup à l’entreprise. Ça s’est bien passé, j’ai pu quitter le groupe en bons termes, avec une rupture conventionnelle.

Quel conseil donnerais-tu à des personnes qui voudraient rejoindre ce type de groupe ?

Je pense que Danone est une boîte où il faut soit être rattaché à un pays en particulier, soit rentrer en tant que jeune ingénieur, et dérouler sa carrière ensuite en son sein. Si tu rentres au niveau monde sans avoir d’expérience dans des groupes similaires, comme Nestlé, P&G, Unilever, ou encore Coca-Cola, tu risques d’avoir des difficultés à saisir le mode de fonctionnement. Pour les jeunes diplômés, je dirais foncez, car c’est une bonne boite.

Aujourd’hui tu travailles chez Serpol à Lyon, qu’est ce qui t’a amené là ?

En quittant Danone, j’ai voulu prendre un peu de temps pour développer de nouvelles compétences, et j’ai suivi la formation du Wagon (école de Développement Web et Data Science) sur un été, en développement Web. Je l’ai ensuite complétée par un diplôme de direction d’entreprise proposé par l’EM Lyon. Il est important pour moi de compléter notre formation scientifique cartésienne avec d’autres approches professionnelles afin d’équilibrer notre capacité à la prise de décision. Au début j’ai travaillé sur un projet personnel, relatif au monde du Kitesurf, tout en restant à l’écoute du marché. Serpol m’a contacté pour un poste de directeur d’activités, j’y suis allé à la cool, et encore une fois, le courant est bien passé. J’ai donc accepté, en négociant du temps libre pour poursuivre ma formation à l’EM Lyon (je le répète, toujours exprimer clairement ce que l’on souhaite).

Et en quoi consiste ton travail ?

Serpol oeuvre dans le domaine de la dépollution des sols, nappes phréatiques, ou encore du désamiantage. Depuis peu, elle récupérait à-droite-à-gauche des contrats pour du traitement de lixiviats de décharges, d’eaux de décapage de tunnels, mais il n’y avait pas vraiment de Business Unit dédiée. J’ai donc été recruté pour la développer. Pour le moment, je gère une équipe de 6 personnes : je créé les fiches de poste, mets en place les rôles et responsabilités de chacun, encadre les remises de devis, définis nos protocoles (combien on vend, comment on le vends). Et puis comme je le disais, tout à l’heure, je poursuis ma formation de direction d’entreprise. C’est un véritable plus pour l’entreprise comme pour moi, car en participant à cette formation, je rencontre plein d’autres acteurs du tissu professionnel de la région. C’est une véritable mine d’or.

Tu parles beaucoup de compléter notre formation, qu’est ce que tu aurais aimé avoir en plus durant ton cycle ingénieur ?

Il n’y a pas de cours en particulier qui m’ait vraiment manqué. Dans l’ensemble nous avons une bonne formation, la preuve en est la satisfaction des entreprises à travailler avec nos alumnis. Cependant, je trouve que nous manquons cruellement de partenariats, de liens avec l’industrie, du moins dans la filière CP. Nous sommes très orientés Recherche, et manquons beaucoup d’ouverture sur le reste. Le cours qui m’a le plus marqué, c’est celui de Bernard Berdeu. C’est le seul qui ramène les choses au concret, dans un contexte d’entreprise, et qui t’invite à ouvrir ta curiosité et à sortir du moule.

Finalement, développer sa culture générale, s’engager dans des activités extrascolaires, créer du lien avec les gens, apprendre à faire des choix/paris risqués, ce sont autant d’axes indispensables pour sortir de sa bulle d’ingénieur. L’esprit cartésien et la rigueur scientifique que nous développons à l’école ne collent pas toujours avec le monde du travail, et peuvent être limitant dans l’évolution d’une carrière. Typiquement en industrie, nous sommes régulièrement amenés à prendre des raccourcis, et on avance en tâtonnant. Notre valeur ajoutée, c’est la pertinence de notre façon d’appréhender les problèmes multi facettes et d’associer des tests cohérents, simples et maîtrisés dans le temps. De même dans le travail en équipe, il faut se connaître, savoir ce qui nous anime et accepter que parfois les gens soient un peu à côté de ce que l’on demande, pour continuer à bien travailler ensemble. En ce sens, les modules d’ouverture de troisième année sont une très bonne initiative, mais il faut les pousser plus loin. Les filières en alternances sont excellentes également, il faut les mettre en avant !

Super ! Pour terminer, as tu des projets perso ou pro en ce moment que tu souhaiterais partager avec notre réseau ?

J’ai effectivement eu un projet de développement de plateforme pour de la location entre particulier de matériel de kitesurf. Nous avions bien bossé avec une amie, et avions même remporté un start-up weekend. Mais je me suis vite rendu compte que c’était compliqué de gagner sa vie avec ce genre de modèle, donc pour le moment, le projet est en stand-by.

En revanche, je suis tout à fait intéressé pour filer des coups de main à des élèves ou des jeunes diplômés, comme mentor par exemple. C’est quelque chose que je fais déjà avec ma famille.

Pour le moment on ne recrute pas d’ingénieur, mais si vous connaissez un dessinateur projeteur 3D, dites lui de me faire signe !

Un grand merci Jean-Philippe pour ton partage d’expérience et tes conseils ! Si vous souhaitez le contacter , voici son adresse mail : pavard.jp@gmail.com

NB: Le projet [Lumière Sur] a pour but de mettre en avant les alumnis de l’école pour vous présenter la richesse de leur parcours et leurs projets. Nous essaierons ainsi de vous proposer régulièrement un nouveau profil en espérant créer des vocations, faciliter les prises de contact, partager les bonnes nouvelles et les beaux projets.

Le format est encore récent et nous sommes toujours à l’écoute de vos remarques et suggestions ! Toujours à la recherche de nouveaux rédacteurs motivés et de nouveaux profils à découvrir, n’hésitez pas à nous contacter (ensmac.alumni@gmail.com) pour :

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